30 août 2011

Roman de taiseux












Je viens de refermer le dernier E. de Luca. C'est un roman de taiseux, de montagnard, d'amoureux de la nature et des bêtes. Un roman d'odeurs, de bruissements, de silences.








C'est aussi et surtout l'histoire d'un chamois et d'un braconnier, tous les deux amoureux des Alpes et de leur territoire, mais dont l'affrontement semble inévitable.








Devant ce duel, on sent le tragique, la tension et l'approche furtive de la fin de vie.








Un texte court, compact, taillé dans le bois, la mousse et la pierre.








A mettre entre les mains d'amoureux des grands espaces, de la faune et de la flore, et du bon air.








Un livre pour tous les avides de poésie contemplatrice.








Un roman où on ne sait si le chamois ou l'homme n'est le héros.

24 août 2011

Le fantomatique absent









C'est une histoire banale. Elle rentre du travail, il a oublié de ramener le pain, elle lui demande si il peut aller en chercher... Sauf, qu'il ne revient pas.


Commence alors une longue et mystérieuse absence, qui va être passée au peigne fin, mise sous l'oeil du microscope de l'écrivain, décortiquée et reconstruite. Peu de choses, en fait, mais une tentative de dire le manque et le vide en mot, mais aussi et surtout l'incompréhensible sortie de l'ordinaire. Parfois on se demande si c'est l'angoisse, la folie, la peur qui guettent la narratrice, ou si tout d'un coup tout va rentrer dans l'ordre.




Etrangement, les lieux vont alors prendre de la place, le cadre de la ville. Certains personnages aussi, dont la mère. Mais le vide prédomine.




C'est donc un livre qui n'emporte pas avec lui, mais qui laisse des creux, des non-sens, des abstractions s'imprimer doucement en nous.






Un livre à conseiller à ceux qui voudraient lire une fois un roman de Darrieussecq pour découvrir son style.






Un livre à conseiller à ceux qui aiment penser que tout peut toujours changer, basculer, palir.






Un livre à déconseiller à ceux qui aiment avoir une intrigue rondement menée.

22 août 2011

Etre patiente












Voici un livre à mettre entre toutes les mains des femmes. Dans Le choeur des femmes, M. Winckler raconte la vie d'un service de gynécologie dans une petite ville. On suit le médecin et son interne, leur relation, son évolution dans le temps. On approche peu à peu l'univers passionant du cabinet. Le dialogue entre soignant et soignée, les incompréhensions, les questions de pouvoir, les douleurs, les peurs.








J'ai préféré la première partie à la deuxième, de ce livre que j'ai pour ainsi dire dévoré en deux jours, alors même que j'étais pleine d'appréhensions au début, vis à vis de ce type de roman.








Je trouve fort qu'un roman arrive à parler en toute simplicité des doutes des femmes, de la sexualité, des désirs, des non-dits, etc. On sent vraiment les angoissées, les désespérées, les craintives, souvent à juste titre. On se prend à rêver à un lien patient médecin différent. Soit même on peut réfléchir au patient qu'on a été. Au patient qu'on pourrait être.








Oui, on peut parler de règles, de pillules, de sterilet, oui, on peut parler d'avortement, et tout ça avec un ton juste et sensible, dans un roman bien mené et construit.








On réalise très vite d'ailleurs que ce livre est le concentré d'années et d'années de pratique de la médecine. On sent le vécu, à travers les témoignages fictifs. Je trouve que le titre est bien trouvé car on entend les voix de toutes ces femmes, qui se mêlent et s'entremêlent, qui font écho, résonnent. On finit par les écouter avec nos trippes.






Un livre à conseiller à toutes.




Un livre vraiment au féminin, écrit par un homme qui écoute les femmes.

















13 août 2011

Histoire et Roman









Un roman à mettre dans votre valise s'il est encore temps: HHhH de Laurent Binet.






Il s'agit du récit de l'opération Anthropoïde, qui avait pour but en 1942 d'assassiner Heydrich, le cerveau et bras droit de Himmler.






Tout y est: suspens, tension pour savoir si les deux parachutistes vont réussir leur coup, mais aussi parcours détaillé d'un chef de la Gestapo, un rien de rien devenu tout puissant et maitre du "protectorat tchèque".






Ce qui est très fort, c'est qu'en plus d'un roman, Laurent Binet nous offre une réflexion sur ce que c'est que d'écrire une fiction qui s'appuie sur des faits, des archives, des recherches. Il s'interroge sur ce que cela veut dire de mettre des mots dans la bouche d'hommes qui ont existé, et dont on ne connaitra jamais les pensées les plus intimes dans les moments les plus forts.






En plus, il y a plein de détails passionnants, intrigants, fous. Je ne vous en dis pas plus.






Enfin, le roman donne à voir une perspective tchèque d'un conflit que l'on connait d'avantage sous l'angle français. Je trouve que cela permet d'aborder la seconde guerre mondiale autrement, et d'une façon très enrichissante.






Bref, à lire si vous avez aimé Alias Caracalla. vous retrouverez la formation des parachutistes à Londres, les pseudonymes à manier avec attention sur le lieu de l'attentat, etc.






A lire si vous aimez les polars ou les romans d'espionnages.






A lire si vous cherchez à comprendre la seconde guerre mondiale et le nazisme.






Ce livre a eu le prix goncourt du premier roman. Il le mérite. C'est frais, décapant, touchant. On suit pas à pas le travail d'un historien en herbe, le travail d'un écrivain en devenir, le développement du nazisme, et la mise en place de la résistance, tout ça dans une langue simple, limpide, et bien huilée.